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DE L’ECOLE DE PSYCHANALYSE DES FORUMS DU CHAMP LACANIEN - FRANCE

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    30 nov. 2020

    Congédier l'humain

    De quelques façons, une contribution de Bruno Geneste

    Congédier l'humain, quelques façons
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    Philippe Madet
    5 déc. 2020

    Du texte de Bruno, de nombreux points suscitent l’envie d’échanger.

    J’en retiens ici un, qui m’a intrigué dès le premier paragraphe, à partir de la phrase suivante: « l’inconscient, sur un certain plan, est inhumain, mais il détermine in fine aussi notre radicale humanité sous les espèces du symptôme ».

    Il y aurait donc a priori un paradoxe: inhumain et humain iraient ensemble. Deux faces qui n’en sont qu’une, à l’instar de la bande de Moebius.

    Ma question: y a t-il à opposer humain et inhumain? Au-delà de la question conceptuelle, n’y a t-il pas là une indication sur la structure du langage et sa dit-mension?

    Prenons le signifiant « inconscient »: est-il l’opposé du conscient? Lacan, avec ses inventions, et en particulier avec la traduction qu’il faut du terme « Unbewusst » par « Une bévue », montre que l’ajout d’une racine négative ne vient pas forcément en opposition ou en annulation.

    Freud l’avait déjà repéré dans L’inquiétante étrangeté: L’unheimlich. Si l’on sen tient au seul dictionnaire, l’unheimlich est le contraire de l’heimlich, qui désigne le familier, ce que l’on connaît, l’intime. Freud découvre que l’unheimlich est lié à l’heimlich, voire qu’ils sont quasiment équivalents, en tout cas qu'il n'ya a pas opposition. L’unheimlich révèle ce qui est au coeur du sujet.

    Lacan a joué avec le langage pour nous faire entendre autrement le caractère moëbien de certains mots, préférant le préfixe « ex » à « In »: il a par exemple parlé d’extime, une autre façon de dire combien ce qui nous semble extérieur nous concerne intimement. Paradoxe a priori: ce qui me concerne n’est pas moi. Voilà une découverte qui ouvre bien des portes.

    Et en effet, l’inconscient est inhumain sur un certain plan, et radicalement humain.


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    Bruno Geneste
    5 déc. 2020

    Cher Philippe,

    Je te remercie pour ce commentaire, et les prolongements que tu donnes à la question, notamment à partir de la référence freudienne à l'Unheimlich. Le terme d ' « humain » nous amène dans un tissu d'équivoques, et il s'agit alors de différencier les « humanités », autrement dit les idéaux, l'humanitairerie de commande, l'humanisme, etc... qui font l'objet de la première partie de mon travail, et qui vont plus ou moins, mais plutôt plus, contre le vivant. Celles-ci sont à distinguer de l'humanité réelle, telle qu'un Beckett ou la cure en prennent l'axe ; ces derniers dégagent le vivant, le plus-humain. Ils permettent de sortir de la « totologie », par laquelle les additions de vanité font au parlant une drôle de tête…

    En effet, le vacillement des termes tient à la structure moebienne. Je pense qu'à ce sujet, il faudrait reprendre les développements de « L'étourdit », mais je serai bien en peine d'en articuler ici quelque chose, sinon pour dire que l'analyse permet de ne plus errer, de ne plus sauter d'un terme à l'autre, qu'elle permet de rompre avec la non-contradiction présente dans l'inconscient, grâce aux coupures opérées et une transformation de la bande moebienne (de fausse à vraie).

    Ensuite, sur la question de l'inhumain, je crois que l'on pourrait rajouter quelques précisions et faire des distinctions. D'abord, il faut noter que c'est un fait clinique qu'en analyse, l'analysant puisse (et c'est heureux) tomber sur un point d'horreur dans sa conduite, qui tient à la façon dont il a été joué par, ou le jouet de, l'inconscient, qui lui apparaît alors comme un partenaire insu particulièrement inhumain. Dès que l'on dit ça, on peut de suite dire trois choses : d'abord que le sujet a été « fait comme un rat » par cet Autre « fantomatique », « absolu », « insaisissable » (tous les termes sont de Lacan dans le S. III), et qu'alors il découvre la part d'inhumanité de sa condition. La découvrant n'est pas sans conséquence pour sa vie. Je signale aussi que cet « être fait comme un rat », rebut, fait l'objet du livre passionnant de Michel Surya sur l'humanimalité dans la littérature depuis Kafka.

    Enfin, on peut sans doute distinguer deux faces du partenaire inhumain, A et a. C'est d'abord l'Autre, et Lacan évoque dès le séminaire sur les psychoses cet Autre au-delà de l'alter ego, par lequel on reçoit son message sous forme inversée, mais qui n'est rien plus que le lieu du langage. Il y a ensuite la Chose. C'est d'ailleurs pour la désigner que Lacan parle dans L'éthique de partenaire inhumain puisque c'est elle qui guide l'amour courtois pour la Dame, et pas la « réalité » humaine, incarnée, de cette dernière. Voilà, il y a aussi l'inhumanité de certaines amours.

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    Florence Signon
    9 déc. 2020

    Bonjour et merci Bruno pour ce développement sur "Les conditions humaines". Je crois que le problème que tu poses et qui est le drame de la condition humaine est le suivant: suffit-il d'être humain pour être vivant? Eh bien non, c'est ce qu'introduit Lacan après son séminaire sur l'Ethique, comment faire entrer la jouissance dans l'affaire du langage ? Il ne suffit pas d'être humain, de parler pour être vivant; de même qu'il ne suffit pas d'être vivant pour être humain (là c'est plus évident!). C'est il me semble tout le chemin de l'analyse et tout l'effort de Lacan dans ses derniers enseignements. C'est un point crucial, sans quoi dit-il "l'analyse serait un délire à deux", si les mots ne s'incarnent pas (dans le corps), le rêve éveillé de la névrose se poursuit, rêve qui laisse le réel hors-jeu. C'est il me semble un des points cruciaux auxquels nous avons à faire avec l'extension de l'utilisation des écrans et du "virtuel". Le réel est la dimension vivante de la condition humaine.

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    Bruno Geneste
    9 déc. 2020

    Chère Florence,

    Je te remercie de relever ce «drame» issu de ce que tu nommes «les conditions humaines», pluriel que je trouve particulièrement bienvenu, et de mettre l’accent sur le réel comme dimension vivante de, cette fois, «la» condition humaine, en y impliquant le corps. Sans quoi, en effet, il y a quelque chose d’un peu unheimlich, pour reprendre le terme employé par Philippe, et même...d’ «humainlich»! L’unheimlich, ça dit d’ailleurs le débordement de l’imaginaire dans le symbolique, qui fait un écho, même s’il est un peu lointain, à la question du virtuel que tu soulèves. Ce dernier est la mise hors-jeu du corps vivant, qui n’est pas celui du miroir, lequel justement prend tout l’empan avec le virtuel. Qu’aurait bien pu dire Schreber de nos apparitions spectrales sur écran? Peut-être aurait-il là aussi parlé, et à bon droit, d’êtres bâclés à la six-quatre-deux!

    Amicalement,

    Bruno   

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